Portrait de Jean-Pascal Beaumont Directeur de la formation Podologie

"Né à Assas !" - Entretien avec le Jean-Pascal Beaumont, Directeur de la foration en Podologie

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Entretien avec Jean-Pascal Beaumont, directeur de l’IFPP (Institut de formation en Pédicurie Podologie)

« Je suis né à Assas » : quand on demande à Jean-Pascal Beaumont ce qui le lie à l’École d’Assas, la réponse ne se fait pas attendre. Ce qui pourrait ne sembler qu’une boutade est en fait le parfait résumé d’un parcours professionnel entièrement consacré à la transmission de sa connaissance de la pédicurie-podologie dans le cadre de l’IFPP. Fidélité et partage, deux valeurs qui nourrissent également son attachement au rugby, son autre passion.

« Je suis dans les murs depuis le début des années 80 puisque j’ai été diplômé en 1985. Les études de pédicurie-podologie duraient alors deux ans mais je les ai interrompues par le service militaire qui, à l’époque, était encore un point de passage obligé.
Après mon diplôme, je me suis installé en libéral dans le Loiret, mais sans succès. Cela m’a conduit à revenir à Paris pour y reprendre le cabinet de l’un de mes maîtres, M. Charpentier, que j’avais eu comme professeur à Assas. C’est lui qui m’a incité à devenir dans un premier temps maître de stage pour les étudiants de l’IFPP puis à prendre, peu à peu, plus de responsabilités au sein de l’institut.
Au départ, j’ai proposé mon expertise en matière d’examen clinique, matière pour laquelle il n’y avait alors aucun titulaire. Ensuite, j’ai eu la responsabilité des étudiants en deuxième année, puis en troisième année, avant d’arriver à la direction de l’institut en 2010. J’ai gardé mon cabinet une dizaine d’années, jusqu’à ce que le temps passé à l’IFPP ne m’oblige à faire un choix qui a été de privilégier l’école. D’une certaine façon, l’activité libérale ne me manque pas car je reste au contact des patients via la clinique.
Entre-temps, j’ai fait un an d’école des cadres à la Croix-Rouge, passé un diplôme universitaire en podologie du sport et suivi de nombreuses formations spécialisées, en médecine chinoise notamment. J’ai essayé d’ouvrir le champ de la podologie pour aller voir ce qui se passait ailleurs, construire mon propre parcours et élargir mon champ d’activités. »

Enseigner pour allumer une flamme

« J’aime mon métier et, très vite, je me suis aperçu que je souhaitais partager cet amour avec les étudiants, ce qui est très valorisant : pour les étudiants, du moins je l’espère, mais aussi pour moi. Depuis près de 30 ans que je suis formateur à l’école, cela m’apporte tous les ans énormément.
Au cours de ces années, j’ai vécu deux réformes des études : tout d’abord, en 1991, le passage d’une formation sur deux ans à une formation sur trois ans et, en 2012, la refonte des programmes sur le modèle européen. Toutefois, les grandes lignes de fond de la formation n’ont pas changé.
Certes, il y a moins de pratique « au pied des patients » mais, en revanche, plus de formation réflexive, à partir d’un cas clinique. Pour partie, cette évolution correspond précisément à ce qui m’avait motivé à me diriger vers l’enseignement : une approche plus approfondie et rigoureuse de l’examen clinique.
Je garde toujours à l’esprit qu’enseigner « ce n’est pas remplir un vase mais allumer un feu », selon le mot de Montaigne. Nous sommes là pour guider les étudiants plus que pour les transformer. L’optique de l’IFPP Assas, c’est de mettre en place des situations d’apprentissage pour donner le goût aux étudiants d’aller chercher par eux-mêmes des solutions. J’espère d’ailleurs que cette optique perdure ensuite dans le temps et que nos étudiants, une fois devenus professionnels libéraux, continuent de s’informer et de se former.
À cet effet, et en partenariat avec Assas Formation Continue, nous nous efforçons de développer la formation continue à l’école pour que les professionnels bénéficient de notre expérience. Nous travaillons en ce moment sur la mise en place d’un DU en cancérologie par exemple. »

Rendre les étudiants autonomes

« Le point essentiel de notre projet pédagogique, c’est de rendre nos étudiants autonomes. Quand un étudiant, et ils sont nombreux à être attirés par l’enseignement, me demande ce qu’il faut faire pour enseigner, je l’invite à se faire son propre parcours : en suivant des formations complémentaires, y compris universitaires puisque c’est désormais possible, mais aussi par des expériences professionnelles différentes, atypiques.
Les formateurs de l’IFPP viennent d’horizons divers, ce qui nous permet d’offrir une pédagogie très riche. Quand je recrute un professeur, je suis attentif à ce qu’il ait déjà un parcours en libéral pour qu’il ait eu l’occasion de se construire comme professionnel et de faire mûrir l’enseignement théorique reçu au cours de ses études. L’idée est de faire collaborer des professionnels avec des compétences et des visions différentes pour en faire bénéficier les étudiants. Il ne s’agit pas de former des robots mais des professionnels complets.
De même, nous travaillons à la mise en place d’échanges de formateurs au niveau international, afin de présenter à nos étudiants des visions et des pratiques différentes de la podologie.
C’est aussi dans cet esprit que nous accueillons les projets diabète, sclérose en plaques et cancer : pour montrer que la podologie c’est aussi l’apport d’un service aux patients et pas seulement une activité économique. C’est une façon de donner une valeur ajoutée à l’IFPP Assas. »

Anticiper l’avenir

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Jean-Pascal Beaumont remettant un certificat à un stagiaire japonais.

« Si on ne s’y prépare pas attentivement, les nouvelles technologies me semblent pouvoir être un risque pour la profession, malheureusement. On commence en effet à voir des fournisseurs qui jusque-là travaillaient avec les podologues passer des contrats avec des entreprises comme Leclerc pour, par exemple, la fabrication de semelles orthopédiques en centre commercial.. Or c’est un marché duquel les podologues sont forcément exclus puisque la loi nous interdit de pratiquer de façon commerciale. Du coup, cela risque d’influer à la fois sur la qualité des produits mais aussi sur la compréhension par le patient de ce qu’est une semelle orthopédique. Il doit y avoir un effort de toute la profession pour affronter ces nouvelles situations. Heureusement, comme j’ai pu le constater au sein du syndicat des directeurs d’IFPP lors de la préparation de la dernière réforme, nous parvenons assez facilement à parler d’une seule voix, ce qui est un bon début pour se faire entendre.
Parmi les évolutions positives, je citerais tout ce qui concourt à élargir l’horizon des podologues. Comme l’irruption du bien-être par exemple. À l’origine, la logique de la formation en pédicurie-podologie est à 100% médicale. Petit à petit, toutefois, et comme dans tous les secteurs de santé, le bien-être y prend sa place. Il ne faut pas le négliger : le bien-être influe sur l’état psychologique général du patient, ce qui peut favoriser de sa part une meilleure acceptation de certains traitements comme les semelles orthopédiques, par exemple. En ce sens, il peut nous aider dans notre relation avec le patient. »

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